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Un lancer franc pour la parité : le Monaco Basket Association passe professionnel

Presque un mois jour pour jour après le sacre en Trophée Coupe de France, le Monaco Basket Association et ses supporters ont connu une nouvelle immense joie. En survolant les playoffs, le club monégasque a obtenu le droit de monter en LF2, la deuxième division française. Une première dans sa jeune histoire. Entre les célébrations et les premiers documents administratifs à fournir à la Fédération française de basket (FFBB), le président Eric Elena court partout. Il s’est posé une demi-heure pour répondre à nos questions sur cette incroyable ascension et la visibilité offerte par son club, notamment sur la question de la parité homme-femme en Principauté.

C’est officiel depuis le 21 mai : le MBA évoluera en LF2 la saison prochaine. Quel sentiment prédomine ?

(Les yeux brillants) Une certaine fierté. Peu de clubs ont gravi les échelons à cette vitesse. L’air de rien, une seule marche nous sépare de l’élite nationale. Nous sommes très heureux et reconnaissants.

Quand vous avez lancé le club il y a douze ans, était-il question de professionnalisme à moyen ou long terme ?

Il y avait de l’ambition, bien sûr, mais elle n’était pas démesurée. Il n’était pas question de sauter les étapes. Nous avons procédé méthodiquement pour ne pas se brûler les ailes. Le bonheur qui nous arrive aujourd’hui est le fruit d’un long travail. Nous avons été capables de prendre les bonnes décisions au bon moment. Tout n’a pas été parfait, certes, mais nous n’avons pas été mauvais. Et, comme le veut l’adage, l’appétit vient en mangeant… (Il sourit)

A quel moment de l’année avez-vous senti que l’accession en Ligue 2 était jouable ?

A la mi-saison. On était sur une bonne dynamique. Malgré nos deux revers sur les quatre derniers matches de 2021, j’avais le sentiment qu’on pouvait maintenir le cap et atteindre l’une des deux premières places qualificatives pour les playoffs. Notre match référence, à mes yeux, est intervenu en mars, contre Voiron (64-62), à l’Annonciade. L’affrontement avait été rude sur le parquet, l’ambiance en tribunes géniale. Voir la salle comble m’a donné des frissons. On a tous pris beaucoup de plaisir ce soir-là.

Vous partiez avec un désavantage en playoffs…

Oui, le règlement ne nous a pas été favorable puisque nous avons perdu deux fois en saison régulière contre Feytiat, la seconde équipe qualifiée. Nous avons donc abordé les playoffs avec un bilan négatif. Au fond de moi, j’avais confiance. Je savais que le groupe avait les capacités et les ressources nécessaires pour inverser la tendance en battant Le Havre et Sceaux.

Vous remportez effectivement vos quatre confrontations.

Le Grand Chelem ! Monter en Ligue 2 en passant d’un bilan de 0-2 à 4-2, c’est unique. Le vice-président de la Fédération française de basket-ball, Alain Salmon, m’a d’ailleurs confirmé que le MBA était la première équipe à réaliser cette prouesse.

Avez-vous rapidement pris conscience de ce qui vous arrivait ?

Non et, pour être honnête, j’ai encore un peu de mal à réaliser. Au buzzer final contre Sceaux (dernière victoire 83-68), c’était la folie. J’ai eu une pensée pour les bénévoles. Je suis très heureux pour celles et ceux qui s’investissent et qui travaillent sans relâche depuis dix ans pour permettre cette réussite. Je souhaiterais également remercier les personnes qui nous ont accompagné et soutenu cette saison. Depuis des années, Yvette Lambin-Berti, secrétaire du Comité Olympique Monégasque, et Stéphane Valeri, président du Conseil national, nous font le plaisir de soutenir l’équipe à l’Annonciade, au milieu des supporters, d’avoir toujours le bon mot pour les joueuses, les bénévoles et les dirigeants. Je pense également au ministre d’Etat, Pierre Dartout, qui a assisté à notre match de la Saint-Patrick. Merci à toutes ces personnes qui nous montrent de la sympathie et du soutien.

Qu’est-ce qui change pour le MBA avec la Ligue 2 ?

On entre dans le professionnalisme. Rien que ça, c’est un énorme changement. C’est l’antichambre de l’élite du basket français, un nouveau monde dans lequel rien n’est laissé au hasard. On va se présenter avec beaucoup d’humilité, pour apprendre, pour progresser et préparer, un jour, une montée en Ligue.

Quid de l’Annonciade ?

Jouer là-bas l’année prochaine sera très compliqué. Pourquoi ne pas évoluer à Gaston-Médecin ? On ne serait pas les premiers à le faire. La salle de Roanne est utilisée par les garçons et les filles, pour les matches comme pour les entraînements. En mettant de la bonne volonté, on trouvera des solutions. L’ASVEL, qui a placé ses équipes masculine et féminine en première division, est-il l’exemple à suivre pour Monaco ? Oui, l’ASVEL a été le premier club à hisser deux sections au haut niveau. Mais il n’est pas le seul. Limoges travaille sur le sujet, Orthez aussi. Tous les clubs ont compris qu’il ne fallait pas proposer une formule unique. C’est une très bonne chose pour le basket. C’est l’avenir. Monaco peut y parvenir. Et le MBA est la solution pour que la Principauté ait une équipe performante dans chaque catégorie.

Et économiquement parlant ?

En consultant les données des dernières saisons, le budget moyen en LF2 se situe entre 700 000 et 750 000 euros. Cette somme nous permettrait de jouer équitablement le maintien. Comme la majorité de nos adversaires sont dans le Nord, les frais de déplacement évolueront en conséquence. Je dois voir les autorités monégasques pour savoir exactement ce que l’on peut faire. En dessous de la somme indiquée, cela ne servirait à rien de monter. Je fais confiance au Gouvernement pour prendre la mesure de cette montée et nous mettre dans les meilleures conditions.

Qu’est-ce que représente cette montée pour vous, pour Monaco et pour le sport féminin ?

Il faut que tout le monde prenne conscience de la performance et de ce que cela peut représenter en termes de visibilité pour la Principauté. Il ne faut pas voir la montée du MBA comme un problème, mais comme une opportunité. Tout le monde parle de la parité homme-femme. C’est un domaine où il reste beaucoup à faire pour atteindre l’égalité. Monaco est très impliqué sur le sujet. Le MBA en LF2 va renforcer l’image moderne et égalitaire de la femme à Monaco.

Propos recueillis par Jérémie BERNIGOLE-STROH

Publié le 23 Mai. 10:21