Dans un silence assourdissant dû au huis clos, la 114e édition du Rolex Monte- Carlo Masters a sacré un vainqueur inédit en la personne de Stéfanos Tsitsipas, chef de file de la Next-Gen. Retour en six faits sur l’épreuve monégasque, la première depuis le décès de la Baronne Elizabeth-Ann de Massy.
Stéfanos Tsitsipas : intouchable
La troisième aura été la bonne. Battu à deux reprises en finale d’un Masters 1000 (Toronto 2018, Madrid 2019), le Grec s’est adjugé son premier succès dans la catégorie. Impressionnant tout au long de la semaine sur l’ocre monégasque, Stéfanos Tsitsipas n’a pas lâché le moindre set à ses adversaires, se débarrassant avec la même facilité d’Aslan Karatsev (6-3, 6-4), de Cristian Garin (6-3, 6-4), d’Alejandro Davidovich Fokina (victoire par forfait après 7-5), puis de Daniel Evans (6-2, 6-1). En finale, Andrey Rublev n’a pas fait le poids, subissant le service efficace du Grec (6-3, 6-3). L’enjeu de la rencontre était trop important pour Tsitsipas, motivé par la perspective de gagner en Principauté comme le fit sa mère, Julia Salnikova, 40 ans plus tôt. Le nom de la lauréate de la Coupe du club allemand international de Monaco 1981 est gravé sur une plaque du MCCC. « C’est de là que toute la volonté de gagner est venue. Je voulais énormément cette victoire pour être ici avec ma mère », a confié le n°5 mondial. Lequel se verrait bien intégrer le Top 3 en fin d’année.
Rafael Nadal & Novak Djokovic : OUT !
Son élimination n’a pas connu le même retentis- sement que sa défaite face à Dusan Lajovic en demi-finale du Rolex Monte-Carlo Masters 2019. Mais cela n’empêche qu’une sortie prématurée de Rafael Nadal, en quarts de finale de « son » tournoi, n’était plus survenue depuis 2014 (défaite face à David Ferrer). L’Espagnol faisait son retour à la compétition. Il n’avait plus joué depuis l’Open d’Australie en février, préférant même faire l’impasse sur Miami pour ménager son dos. Et sa défaite face au futur finaliste Andrey Rublev n’avait rien d’illogique compte-tenu de ses 36 fautes et des conditions climatiques défavorables à son jeu (froid et vent). En revanche, elle ne remet absolument pas en cause un éventuel 14e sacre à Roland-Garros (du 24 mai au 13 juin). Il s’est d’ailleurs rapidement repris en remportant l’Open de Barcelone à l’issue d’un duel de 3h38 contre Stéfanos Tsitsipas (6-4, 6-7 (6), 7-5). Autre gros
client écarté rapidement du Monte-Carlo Country Club, Novak Djokovic a flanché contre l’étonnant Daniel Evans (6-4, 7-5). Son premier revers après dix succès d’affilée en 2021. Et le Serbe, en manque de rythme lui aussi depuis son titre en Australie, n’a pas rassuré en chutant en demi-finale à Belgrade, neuf jours plus tard.
La Next-Gen : au rendez-vous
Pour la première fois depuis 2010, ni Roger Federer, ni Rafael Nadal et ni Novak Djokovic n’ont disputé la finale des deux premiers Masters 1000 de la saison. Alors, certes, ils étaient tous les trois forfaits à Miami, mais les deux derniers cités ont connu les affres de la défaite en Principauté. Toute heureuse de voir une telle opportunité se présenter, presque aussi rare que le passage de la Comète de Halley, la Next-Gen ne s’est pas faite prier pour prendre la lumière. Si la jeunesse italienne a déçu (Jannik Sinner, Lorenzo Musetti, Lorenzo Sonego et Matteo Berrettini sont sortis en sei- zièmes de finale), Andrey Rublev, Casper Ruud et Stéfanos Tsitsipas ont rejoint le dernier carré. La moyenne d’âge des demi-finales, gonflée par le trentenaire Daniel Evans, atteignait tout juste 24 ans. « On a l’habitude de voir Novak et Rafa aller loin dans tous les tournois. Laissez les jeunes couteaux montrer ce qu’ils ont dans le ventre ! C’est ce qu’il faudrait de temps en temps. Même toujours, pas quelques fois », a plaisanté le Grec en conférence de presse.
Les Monégasques : tombés d’entrée
Détenteur d’une wild-card, Lucas Catarina a évité les qualifications pour s’assurer un passage en 32e de finale. Malheureusement pour le Monégasque, les conditions climatiques lui ont joué un mauvais tour. Il menait un set à rien face à Salvatore Caruso (n°89) lorsque la pluie s’est invitée et a interrompu la rencontre. Le lendemain, Lucas Catarina s’est finalement incliné (6-7, 7-6, 6-3). « J’ai essayé de ne pas trop penser au match, mais ce n’était pas facile. J’étais dans une bonne position, mais j’étais encore loin d’une victoire. C’était difficile à gérer », a-t-il avoué après la rencontre. Depuis, le joueur monégasque s’est illustré à Angers lors de l’Open d’Anjou, battant le 281e mondial Chun Hsin Tseng avant de s’incliner en finale contre Manuel Guinard (7-5, 6-4). Un double monégasque était également engagé sur les courts du Monte-Carlo Country Club, mais Hugo Nys et Romain Arneodo ont déclaré forfait en seizièmes de finale face à Hubert Hurkacz et Félix Auger-Aliassime -entouré par un certain Toni Nadal-. Menés une manche à zéro (7-5), ils ont jeté l’éponge, Nys souffrant d’une angine blanche.
La clameur : aux abonnés absents
Le Monte-Carlo Country Club a sonné creux. Cela n’a échappé à personne et encore moins aux joueurs, qui désignent, d’habitude, le Rolex Monte-Carlo Masters comme « le meilleur tournoi du circuit ». Stéfanos Tsitsipas en tirait un peu de positif : « C’est beaucoup mieux d’avoir plus d’espace pour les joueurs, afin que nous puissions bouger. Cela favorise aussi une meilleur ambiance entre nous. » L’annonce du huis clos est intervenue en février, alors que l’Open d’Australie se jouait avec du public malgré une alerte et un confinement de cinq jours dans l’Etat du Victoria en plein tournoi. Mais la situation sanitaire était alorsbien différente entre le pays des Kangourous et la Principauté, et la décision des autorités locales était, par conséquent, juste. Peu avant le tournoi, le directeur adjoint Philippe Rialland avait même déconseillé aux fans de s’approcher de l’enceinte dans l’espoir de voir les joueurs. Restait alors une dernière solution, celle de regarder les matches à la télévision, dans une ambiance très triste. « J’espère que nous pourrons accueillir du public très bientôt dans les grands tournois en Europe », glissait Novak Djokovic. Espérons que la 115e édition du Rolex Monte-Carlo Masters ne fasse pas exception.
Hommage à la Baronne Elizabeth-Ann de Massy
Alors que les premiers matches du tableau final du tournoi se disputaient, le Souverain, Mélanie-Antoinette de Massy, Novak Djokovic et Rafael Nadal ont participé à une cérémonie d’hommage à la Baronne Elizabeth-Ann de Massy, le 11 avril. L’ancienne présidente du Monte-Carlo Country Club et de la Fédération monégasque de tennis, décédée le 10 juin dernier, était « une dame exceptionnelle, élégante, à l’attitude extraordinaire » et possédait « une vision claire tournée vers le progrès, toujours remarquable », a déclaré le tennisman espagnol. L’undécuple vainqueur du Rolex Monte-Carlo Masters lui vouait un tel respect, qu’il l’appelait « La Madame ». Une plaque en son honneur a été dévoilée. Elle devrait être installée sur l’allée principale du club, un lieu où la Baronne Elizabeth-Ann de Massy a tant œuvré pour le tennis monégasque.