A chaque numéro, Code Sport Monaco vous propose de découvrir les personnalités sportives de la Principauté sous un autre angle. Olivier Campana, directeur général adjoint du Yacht Club de Monaco et pilote de rallye amateur, s’est prêté à l’exercice du « Qui es-tu ».
■ Votre premier sport ?
Une brève expérience au club d’escrime, où les entraîneurs me trouvaient trop agressif. (Rires.) Par chance, Monaco propose une telle diversité de sports que vous trouverez forcément votre bonheur à des prix absolument raisonnables. Le mien, c’était la voile. Même si mon grand-père a représenté Monaco dans cette discipline aux Jeux olympiques de Rome en 1960 (Jules Soccal), ce n’était pas tellement une histoire de famille. J’ai découvert la voile par hasard à l’âge de huit ans. Problème : j’ai eu très peur du vent. J’ai mis du temps à revenir. J’avais dit « plus jamais ». Finalement, 40 ans plus tard, ça ne va pas si mal ! (Rires.)
■ Et le sport automobile ?
Une passion indissociable de mon amour pour la mer, car le premier contact s’est fait depuis l’ancienne école de voile, qui était située à proximité de la Rascasse et donc du circuit de Formule 1. Avec mon meilleur ami, un certain Daniel Elena, nous regardions Christophe Spinotis, plongeur sous-marin et pilote de rallye, préparer son Monte-Carlo. Ça nous démangeait de l’imiter.
■ Votre amitié avec Daniel Elena ?
Daniel, c’est mon ami d’enfance, mon témoin de mariage. On a fait les Jeux des petits Etats d’Europe ensemble. Déjà, à l’époque, on se disait qu’on ferait un rallye, lui comme pilote moi co-pilote. Notre voeu s’est réalisé en 1997 avec le Monte-Carlo. On a ensuite eu nos carrières respectives, lui a choisi le sport automobile avec la carrière qu’on lui connaît, tandis que je suis rentré au Yacht Club il y a 31 ans. De base, c’était pour trois jours ! (Sourire.) Daniel et moi avons réussi à vivre de nos passions, et c’est magnifique.
■ Ce que vous aimez dans votre discipline ?
Plus on grandit, plus on est animé par la transmission. Je prends plaisir à voir les enfants du club naviguer, puis revenir sur le quai, sourire jusqu’aux oreilles et yeux plein de sel. C’est un spectacle dont on ne se lasse pas. On se revoit forcément en eux.
■ Votre meilleur souvenir ?
J’ai eu la chance de rencontrer et de naviguer avec des légendes de la voile comme le double vainqueur de la Route du Rhum Laurent Bourgnon (disparu en mer en 2015) et Dennis Conner, un voileux américain exceptionnel, ayant gagné la Coupe de l’América à quatre reprises. Mais aussi d’avoir échanger avec des pilotes d’exception tels que Jean Ragnotti et Sébastien Loeb. Ce dernier m’a offert un tour de manège dans une voiture de rallye au Monte-Carlo, en Angleterre et en Suède, sur la glace. C’était aussi inquiétant que magique ! Séb’ évoluait sur une autre planète.
■ Et le pire ?
Les mauvais souvenirs, on les oublie. Je pourrais parler des abandons en cours de rallye, comme cette sortie de route à deux spéciales de la fin de notre premier Monte-Carlo avec Daniel, mais c’est une erreur qui nous a fait progresser. Il faut savoir accepter la défaite, l’échec. Pour en revenir à votre question initiale, j’ai perdu des amis dans ces différents sports. On sait que la mort peut survenir à tout moment sur l’eau ou sur la route. On est conscient des risques. Moi-même je suis tétanisé de peur lorsque je vois ma fille monter un cheval, mais je ne vais pas l’empêcher de faire un sport qui lui plaît.
■ La personnalité qui vous a inspiré ?
Elles sont nombreuses. Outre le commandant Cousteau et Daniel, il y a Mike Horn. Je l’ai connu à ses débuts. C’est quelqu’un d’exceptionnel humainement parlant, et dont on apprend beaucoup. A Monaco, nous avons la chance de pouvoir échanger avec des personnalités incroyables, quel que soit le sport. C’est ce qu’on essaie de faire vivre aux enfants du club.
■ Le métier que vous rêveriez d’exercer ?
Je l’exerce déjà puisque je travaille au Yacht Club ! Plus jeune, je n’avais aucune idée de ce que je ferais plus tard. A mon époque, les enfants vivaient à l’instant T, sans s’imaginer à tel poste ou à tel endroit. Je trouve qu’on avait moins de pression que les gamins d’aujourd’hui.
■ Votre plus grand rêve sportif ?
Remporter le Rallye Monte-Carlo Historique. Je le dispute fidèlement depuis 2011. Tant que je serai en mesure de rouler, je le ferai avec plaisir. Et avec la ferme intention de m’imposer, ne serait-ce qu’une fois. Avec Daniel, on a pris la sixième place en 2017. Depuis six ans, je roule avec mon épouse. Nous avons terminé 12e (sur 203) en 2022. Mais notre plus grande réussite est que notre mariage a survécu à toutes ces éditions. Je dis souvent que si l’on veut vérifier la solidité d’un couple, il faut s’engager dans le sport automobile. (Sourire.)
■ Pourquoi l’Historique ?
L’Historique, c’est un musée de l’automobile. Ou, pour paraphraser Michel Ferry (vice-président de l’Automobile Club de Monaco), « c’est un patrimoine de l’automobile sur la route ». Cette épreuve convoque les souvenirs. Les spectateurs nous interpellent souvent à propos de notre Golf GTI de 1979, nous disant qu’ils en possédaient une en telle année. J’aimerais le disputer un jour avec mon fils. Je lui ai transmis l’amour du sport automobile, un virus pour lequel on n’a pas encore trouvé de vaccin ! C’est bon signe.
■ Vos autres passions dans la vie ?
Voir grandir mes enfants et transmettre ma passion. Ayant eu la chance de grandir entre la mer et la montagne, j’apprécie aussi la plongée et l’alpinisme. Ma maman a longtemps présidé le club alpin, mon papa était également un amoureux de cet univers. Le montagnard et le marin se ressemblent. Ils ont le même engagement, le même respect de la nature, comme le rallyman. Les trois doivent composer – au sens noble du terme – avec l’environnement, anticiper les conditions météo…
■ L’anecdote que vous n’avez jamais révélée ?
Je n’ai pas d’histoire croustillante, hélas ! mais j’aimerais évoquer le premier titre mondial de Daniel. Je l’ai vécu en direct, en Corse, en 2003. C’était magique de voir son meilleur ami faire briller les couleurs monégasques. Avec ses neuf couronnes, il est le sportif le plus titré de l’histoire de notre pays. Ce premier sacre, c’était la récompense d’un long travail et de plusieurs sacrifices. Il répétait depuis le début qu’il serait champion du monde. Ça veut bien dire que la programmation mentale joue un rôle essentiel dans la construction d’un gagnant. S’il a bien fêté son titre ? Joker, même si la réponse est dans la question ! (Rires.)
Propos recueillis par JB