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Michael Mokongo : « En N1, on n’avait pas de vestiaires attitrés ! »

Michael Mokongo a été le meneur de l’AS Monaco Basket entre 2013 et 2015. Il a ainsi connu la bascule du monde amateur à l’univers pro. Toujours en activité du côté de Trappes, le Franco-centrafricain revient sur son passage et donne son avis sur l’évolution du club.

A 35 ans, vous n’avez pas raccroché les baskets.

Je poursuis ma carrière à Trappes (actuellement deuxième de la poule G de Nationale 3). A côté, je gère mes projets en Afrique dans le transport et l’immobilier,  je travaille pour Canal+ Afrique en tant que consultant et je lance StadiumPrime avec des amis, une plateforme digitale de recrutement spécialisée dans le monde du sport, amateur et professionnel. Et j’ai mon camp de basket, que je mets en place cet été à Paris et en Centrafrique. Mes journées sont très chargées, mais j’aime ce que je fais ! (Sourire)

Pourquoi lancer ces camps de basket dans votre pays ?

Le basket s’est pas mal détérioré par rapport à la situation sécuritaire et politique de la Centrafrique. On parle du sport-roi du pays ! L’idée était d’aider cette jeunesse en perdition, de détecter les meilleurs talents pour les accompagner vers leurs rêves.

Comment avez-vous nourri le vôtre de devenir basketteur professionnel ?

Mon père, un ancien sportif devenu docteur, a accompagné les athlètes centrafricains pour les Jeux olympiques de Barcelone en 1992. Il est rentré à la maison avec un panier de basket. C’était le début d’une histoire qui m’a mené très tôt en France, à neuf ans, chez mon oncle. La décision provenait de mes parents, car il y avait un espoir me concernant. En Centrafrique, je ne pouvais pas faire carrière et me développer. La séparation avec ma famille a été difficile. Je ne savais rien de la vie. Mais, aujourd’hui, avec le recul, j’ai compris que mes parents avaient pris la meilleure décision.

Où avez-vous atterri ?

A Coulommiers, dans le 77. Je suis resté quelques années avant d’intégrer le pole Espoir à Châtenay-Malabry puis l’équipe Cadets à Torcy et le centre de formation de Chalon.

Bien avant de signer à Monaco, vous avez pas mal bourlingué. C’était votre volonté ?

Dans un premier temps, oui. Mais en 2013, pas du tout. Je changeais de pays fréquemment (Italie, Turquie, Espagne, Chypre). A ce stade de ma carrière, je cherchais la stabilité. Je voulais rester en France. Les propositions ne sont jamais arrivées, sauf en Espagne. En signant mon contrat avec Planasa Navarra, j’ai inclus une clause de résiliation me permettant de rentrer dans l’Hexagone suivant les occasions.

Une semaine après, vous rejoigniez la Principauté.

C’est ça ! Je passe quatre, cinq jours en Espagne, dispute mon premier et seul match avec l’équipe durant lequel j’inscris 20 points. 35 d’évaluation, meilleur joueur du week-end. Mon agent m’appelle et me dit que Savo Vucevic cherche un meneur pour driver l’équipe de Monaco, que le projet tenait sur deux, trois ans. L’ASM était alors en N1. Je ne voulais pas descendre de niveau. J’étais perplexe. Savo m’a affirmé que les dirigeants avaient la volonté de porter Monaco en première division. Derrick Obasohan, que j’ai affronté en match international, m’a confirmé l’information.

Que connaissiez-vous de Monaco ?

Honnêtement, pas grand chose niveau basket. Je savais que l’équipe avait évolué en première division il y a plusieurs années, que Jean-Aimé Toupane était passé par le club… Après, le pays, tout le monde le connaît.

Et finalement ?

Je suis resté deux ans et demi, et l’expérience a été très bonne. Un club sérieux, des dirigeants très motivés pour atteindre les sommets, de très bons coéquipiers. J’avais une bonne relation avec Savo. Il m’a donné carte blanche. Le seul moment difficile a été ma grave blessure au genou l’année de la montée. Je savais que l’ASM souhaitait me conserver. Jouer en première division  avec l’équipe était la finalité. Il n’empêche que le club s’est bien occupé de moi durant ma convalescence. Je ne garde vraiment que de bons souvenirs.

Sentiez-vous le potentiel sous-jacent ?

J’étais persuadé que les Monégasques joueraient en première division. Mais aller aussi loin ? Non. Les dirigeants avaient la volonté tenace de structurer le club. Ils faisaient tout pour que les joueurs se sentent bien. La pression était sur nos épaules, mais elle était légitime. Ils s’investissaient beaucoup et leurs actions ont toujours été cohérentes. Alors, même si je n’aurais pas parié dessus à l’époque, les voir en play-offs d’Euroligue en 2022 ne m’étonne pas.

Et la victoire en Eurocoupe ?

C’était exceptionnel ! Monaco, comme Chalon, fait partie des clubs qui resteront à vie dans mon coeur. J’étais très fier de suivre le parcours de la Roca Team, de Zvezdan Mitrovic. Ce sacre européen, c’est celui des dirigeants, des bénévoles, des joueurs, actuels comme anciens. Chacun a apporté sa pierre à l’édifice. C’était notre victoire, à tous.

Venez-vous régulièrement à Gaston-Médecin ?

J’ai assisté à quelques rencontres fin octobre, face à l’Etoile rouge de Belgrade et le CSKA Moscou. J’étais dans le Sud avec ma famille et en échangeant avec Oleksiy Yefimov, le directeur exécutif, ce dernier m’a invité.

Avez-vous reconnu la salle ?

J’ai ressenti un choc en découvrant les incroyables changements. Et les spectateurs, surtout ! En N1, il n’y a presque personne (rires). Il y a tellement de choses à faire à Monaco que personne n’était intéressé par une équipe de notre niveau. On a enchaîné 25 victoires d’affilée, décroché la montée en Pro B et un certain engouement est né autour de l’équipe. On n’avait même pas de vestiaires attitrés ! La différence était flagrante lors de mon retour : salle, vestiaires, jeux de lumière, le spectacle autour… Le club a changé de galaxie.

Que faut-il attendre de la Roca Team ?

L’équipe va aller le plus loin possible. Elle n’est pas là pour faire de la figuration. Regardez le poster. Mike James, c’est top 5 Euroligue. Il y a des joueurs NBA, de grands noms français. Monaco mise sur le long terme, à l’image de l’ASVEL. C’est bénéfique pour le basket français. On ne peut que s’en réjouir. J’espère qu’ils gagneront l’Euroligue, un jour.

Propos recueillis par Jérémie BERNIGOLE-STROH

 

Publié le 21 Avr. 10:22