Après 41 ans passés au Monte-Carlo Golf Club, le directeur Charles Houtart va tirer sa révérence à la fin du mois de juin. Pour Code Sport Monaco, l’ex-joueur professionnel raconte une existence consacrée à la petite balle blanche et à la quête d’excellence de ce club prestigieux.
En juin prochain, après 41 ans d’une fidélité sans faille au Monte-Carlo Golf Club (MCGC), Charles Houtart prendra une retraite bien méritée. Celui qui a assuré la direction de cette institution pendant la majeure partie de son long et riche parcours, ne pouvait tourner la dernière page du livre de sa carrière professionnelle sans jeter un œil dans le rétroviseur. Au cours d’un entretien accordé le 9 janvier, il nous a raconté plusieurs anecdotes, dont ses parties disputées contre l’ancien pilote de Formule 1 Nigel Mansell en pleine semaine du Grand Prix de Monaco, ou encore les visites de golfeurs de renommée internationale comme Rory McIlroy ou Alexander Noren. Charles Houtart a aussi et surtout rendu un vibrant hommage à la famille Rey, et notamment à Henry Rey, cinq jours avant la disparition du président du MCGC.
L’heure de la retraite a sonné. Quels sentiments dominent à l’aube de ce nouveau chapitre ?
Effectivement, je prendrai ma retraite à la fin du mois de juin. J’éprouve un sentiment de satisfaction, celui d’avoir accompli ma mission, épaulé par le personnel du Monte-Carlo Golf Club. C’est un travail d’équipe, et je suis honoré de l’avoir mené à bien.
Quel regard portez-vous sur votre parcours ?
J’ai passé 41 années au MCGC et j’en suis fier. En France, aucun autre directeur n’a tenu son poste aussi longtemps dans un même club. Je pense avoir réussi, avec le soutien du comité et de la famille Rey, à faire du MCGC un club prestigieux et reconnu dans le monde entier.
Comment êtes-vous arrivé à ce poste de directeur ?
J’ai été nommé à ce poste après sept ans d’enseignement au MCGC. Lors du départ en retraite de mon prédécesseur, le président Me Jean-Charles Rey (le père d’Henry Rey) m’a proposé de reprendre cette fonction. Il m’était difficile de lui dire non. Les premiers temps ont été délicats : auparavant, en tant qu’enseignant, je côtoyais tous les membres du personnel avec une certaine complicité. Devenir leur supérieur, instaurer un respect mutuel, a été un challenge. C’est le capitaine de l’époque, Me Henry Rey, qui m’a soutenu dans cette transition et qui, par sa rigueur, m’a formé à la tâche. Comme son père, il était exigeant et avait une idée très précise de ce que devait être un directeur de golf. J’éprouve une profonde reconnaissance pour lui et sa famille.
Comment définiriez-vous votre rôle à la tête de ce club spécial ?
Ma fonction se décline en de multiples facettes : la gestion des tâches administratives, l’entretien méticuleux du parcours en coordination avec le directeur technique, avec lequel je m’entretiens quotidiennement. J’échange aussi fréquemment avec le directeur du restaurant et la responsable du pro shop. J’assure également les relations avec les membres du club ainsi qu’avec les golfeurs de passage. Mon rôle implique aussi une interaction constante avec le comité et avec le président ou avec son vice-président. C’est une fonction riche et exigeante, où chaque journée amène son lot de défis.
Vous avez été joueur professionnel. Que retenez-vous de votre carrière ?
Je n’étais pas le plus fort. Je me situais parmi les vingt meilleurs golfeurs français de mon époque. J’ai participé à des tournois en France et en Europe mais, à cette époque, je n’étais pas assez bien entouré pour prétendre à mieux. De plus, je donnais déjà beaucoup de cours.
Le MCGC est une véritable institution. Qu’est-ce qui, selon vous, confère à ce club son prestige et sa singularité ?
Il y a d’abord ce site à la vue incomparable : d’un côté, les Alpes du Sud ; de l’autre, la mer Méditerranée. Du trou n°5, on contemple trois pays : Monaco, la France, l’Italie. Puis, l’excellent entretien du terrain. En toute objectivité, je pense que nous faisons partie des meilleurs de la région et de France dans ce domaine. Sans oublier la qualité du restaurant, un lieu où l’on mange très bien, dans une ambiance chaleureuse et conviviale, fidèle à l’esprit du club. Le comité a toujours voulu cultiver cette atmosphère et nous avons su préserver cette tradition.
Quels souvenirs marquants conservez-vous de votre carrière au MCGC ?
Il y en a plusieurs, mais l’un des plus mémorables reste l’organisation, avec mes collaborateurs, du Monte Carlo Open, un tournoi du circuit européen (neuf éditions entre 1984 et 1992). Je me souviens aussi de la compétition pour les professionnels seniors en alliance avec des célébrités.
Avez-vous une anecdote à nous raconter ?
Je me rappelle notamment de la Dream Team, l’équipe américaine de basket des Jeux olympiques de Barcelone en 1992, avec Michael Jordan en tête de gondole. Ils étaient tellement grands qu’ils se pliaient pour entrer dans le taxi. Autre souvenir marquant, j’ai joué trois trous avec Nigel Mansell (pilote de F1, champion du monde en 1992) et Greg Norman (golfeur, vainqueur du British Open en 1986 et 1993) pendant la semaine du Grand Prix de Monaco. J’ai eu le plaisir de croiser ce dernier à Paris, cet été. Nous avons parlé du bon vieux temps ! Quant à McIlroy, c’était un golfeur impressionnant. Du bunker d’entraînement au fond du practice, il frappait des balles sur 240 mètres avec des Fer 2, presque jusqu’au tapis des practices actuels ! C’était, de surcroît, un sacré personnage.
Vous avez également œuvré pour le développement du golf chez les jeunes. Cela faisait-il partie de vos priorités dès votre prise de fonction ?
Depuis le début de mon activité, je me suis occupé de cette école de golf, assisté par nos trois professeurs exceptionnels que sont Sophie Halsall, Frédéric Ruffier-Meray et Jean-Marc Loustalan. A l’époque, l’école était réservée aux enfants de membres. L’objectif était de leur transmettre la passion du golf, pour qu’ils deviennent membres à leur tour. Ç’a bien fonctionné puisque j’en croise encore certains qui ont de très bons souvenirs de cette école qui a évolué au fil du temps. Charles-Henri Rey (le fils d’Henry Rey) a pris la relève à la tête de la commission sportive et il souhaite que l’école ne soit plus réservée aux enfants de membres. Nous accueillons désormais des scolaires de Monaco et comptons 45 juniors dans nos rangs. J’en suis ravi. Le but reste inchangé : faire de ces jeunes des talents pour l’équipe première du MCGC.
Quelles qualités recherchez-vous chez votre successeur ?
La diplomatie est, selon moi, la qualité essentielle pour celui ou celle qui prendra la relève. Mon successeur devra aussi garantir la continuité de notre travail, avec une capacité à s’adapter au monde moderne. Son profil ? La Société des Bains de Mer (SBM) et le comité ont demandé à ce que le prochain directeur soit une personnalité reconnue, issue d’un grand club français. Les candidatures sont nombreuses, et le choix reste à faire. En tout cas, je m’engage à accompagner mon successeur pendant trois mois pour l’aider dans cette transition.
Quel avenir se dessine pour le golf à Monaco ?
L’école de golf restera au cœur de notre développement. Nous voulons la rendre encore plus performante pour garantir l’avenir et le succès des équipes du MCGC. Quant à la vie du club, nous espérons continuer à offrir plus de services, tout en conservant notre image de luxe, à la hauteur de celle des établissements de la SBM.
Comment envisagez-vous votre retraite ?
Après avoir consacré 41 ans à mon travail, je compte désormais m’occuper de ma famille, et passer plus de temps avec mon épouse. Je vais aussi jouer plus régulièrement au golf, au moins trois fois par semaine. J’ai l’ambition de gagner quelques tournois seniors à l’échelle nationale et à l’international. Pour le reste, je vais me remettre à la lecture et écouter de la musique, mes deux autres grandes passions.
Propos recueillis par Jean-Marc Moreno et Jérémie Bernigole