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Oleg Petrov (AS Monaco) : « J’espère que ce n’est que le début »

Le vice-président Oleg Petrov affiche des ambitions élevées pour la prochaine saison après la qualification de ses joueurs pour le troisième tour préliminaire de la Ligue des Champions.

Souriant et chaleureux, Oleg Petrov nous a accueillis dans son bureau du Stade Louis-II, où figure un tee-shirt à l’effigie de Jean-Paul Chaude, président du Club des Supporters disparu en mai. Avec un match nul décroché à Lens trois jours auparavant, l’AS Monaco a scellé sa troisième place de Ligue 1 et fait un pas vers la Ligue des Champions. Les Monégasques devront passer par le troisième tour préliminaire et les barrages, avant de disputer la phase de groupes de la plus prestigieuse des compétitions européennes. Tous les voyants sont au vert, donc, pour Oleg Petrov, qui a souligné la deuxième partie de saison « exceptionnelle » et a affiché des ambitions élevées pour la prochaine. Un entretien d’une vingtaine de minutes, intégralement en français, s’il vous plaît.

Quelle analyse faites-vous de la saison de l’AS Monaco ? 

La deuxième partie a été exceptionnelle. (Il sourit) Nous souhaitions réintégrer une compétition européenne. L’objectif a été atteint plusieurs semaines avant la fin du championnat en parvenant même à nous hisser sur le podium devant des concurrents prestigieux tels que l’OL et l’OM. Nous avons également disputé la finale de la Coupe de France (perdue 2-0 face au PSG), ce qui n’était plus arrivé depuis 2010 pour l’AS Monaco. 

Qu’est-ce qui a favorisé ces résultats ? 

Beaucoup de facteurs et de décisions prises sur et en dehors du terrain ont permis de réussir cette saison. Un nouveau chapitre de l’histoire de l’AS Monaco a été ouvert l’été dernier et un changement d’état d’esprit s’est opéré avec l’arrivée d’un nouveau directeur sportif, d’un nouveau staff technique et la création de nouveaux départements innovants en adéquation avec l’évolution du football moderne, à l’image de la performance ou de l’analyse de données… Niko Kovac a aussi apporté un nouveau style de jeu et permis à l’équipe de retrouver un « fighting spirit ». De plus, la culture, l’énergie et l’esprit de changement dans le secteur administratif ont impacté l’équipe. En réalité, tout ce qui a été entrepris autour du club nous a aidés à obtenir ce résultat magnifique. Notre succès est la conséquence de multiples efforts. 

Le club restait pourtant sur deux exercices délicats. Quelles leçons avez-vous tiré de cette période ? 

J’ai appris que le football est un métier particulier, aucun détail ne peut être négligé. Acheter le meilleur joueur du monde est loin d’être suffisant. Dans ce milieu, la réussite est une combinaison de plusieurs facteurs. Quand tous les secteurs sont bien organisés et que tous les éléments sont réunis, le succès n’est jamais très loin. Mais on ne peut se contenter d’une année réussie. Il est très important que l’AS Monaco s’installe durablement sur le podium. J’espère que cette saison n’est que le début.

A quel moment avez-vous senti que vos joueurs étaient capables d’atteindre l’objectif mais aussi de frapper à la porte du Top 3 ?

C’est une bonne question. En janvier, je commençais à sentir que nous étions prêts à nous battre pour le podium. J’étais satisfait du début de saison, même si la nouvelle organisation et Niko ont eu besoin de prendre leurs marques au club et leurs repères en Ligue 1. Des revers nous ont impactés, contre l’Olympique Lyonnais et le Stade Rennais notamment. Mais chaque défaite a été l’occasion d’apprendre et de progresser pour ce groupe jeune et talentueux. L’expérience et le niveau de maturité ont augmenté au fil des rencontres. J’ai senti que l’équipe était en progression. Niko a fait un travail remarquable, tous les joueurs ont travaillé d’arrache-pied pour arriver à cette troisième place. Je pense que l’enchaînement des premiers résultats positifs en janvier a constitué le déclic. 

Vous évoquez des défaites frustrantes. Quand on voit le faible écart de points (5) avec Lille, champion de France, nourrit-on de petits regrets ?

On peut en effet toujours nourrir des regrets mais c’est le football, il faut l’accepter. Notre défaite contre Strasbourg a constitué une déception sur le moment car elle a mis fin à une longue série de résultats positifs, mais ce fut un accident. Quand nous avons perdu à la maison contre l’OL (2-3), j’espérais franchement un match nul. (II répète) Mais c’est le football. C’est aussi le risque avec une équipe jeune. Prenez cette défaite contre l’OL : après le carton rouge adverse (à la 70e minute, le score était alors de 1-1), l’équipe s’est lancée à l’attaque et a peut-être manqué de maturité pour défendre. Mais lorsque je repense à notre niveau de performance en 2021, on ne peut pas nourrir beaucoup de regrets…

Justement, depuis le lourd revers contre le RC Lens en décembre (0-3), le bilan monégasque est de 22 victoires, quatre nuls et trois défaites toutes compétitions confondues. Comment expliquez-vous cette forme exceptionnelle sur le deuxième volet de la saison ?

C’est la combinaison de nombreux efforts collectifs. Je pense que les joueurs ont eu besoin d’un peu de temps pour s’adapter au nouveau staff technique et inversement. Cet effectif très jeune a eu la chance de rapidement progresser et prendre confiance. Je pense que l’important travail physique et tactique réalisé en première partie de saison a eu une vraie incidence en 2021 sur le niveau de performance affiché par l’équipe. Elle est montée en régime au fur et à mesure de la compétition et a montré une réelle unité jusqu’au dernier match.

En prenant un peu de recul, quelle est votre plus grande satisfaction?

L’esprit de compétition et de solidarité au sein du club. C’est très important. Aujourd’hui, l’AS Monaco ressemble à une famille. Cette équipe a réussi à souder et à entraîner l’ensemble du club avec elle.

Et le joueur qui vous a le plus impressionné ?

C’est compliqué ! Je suis très satisfait de la progression de l’équipe dans sa globalité et notamment de la progression de nos jeunes à l’image du niveau atteint par Aurélien (Tchouaméni). Il ne jouait pratiquement pas avec Bordeaux lorsque je l’ai contacté (18 matches entre août 2019 et janvier 2020). C’était déjà un grand joueur mais il n’avait pas eu l’occasion de le montrer.

On connaît la suite, avec son titre de meilleur espoir de la saison en Ligue 1…

Exactement. La paire qu’il forme au milieu de terrain avec Youssouf (Fofana) est très jeune. Les deux n’avaient pas une grande expérience, mais ils ont réussi leur mission cette saison. Pour revenir à votre question, je suis également très satisfait de Kevin (Volland), de son caractère et de son énergie. Wissam (Ben Yedder), aussi, a fait un travail magnifique. Il s’est comporté en leader. En défense, Axel (Disasi) et Benoît (Badiashile) ont affiché beaucoup de progrès en dépit de leur jeune âge…

Les recrues ont connu une intégration express. Vous attendiez-vous à les voir à l’aise aussi rapidement ? 

Je l’espérais et je n’avais aucun doute là-dessus. Prenez Caio (Henrique) qui n’avait pas beaucoup joué à Madrid, il s’est parfaitement intégré sur son côté gauche tout comme Axel Disasi, qui s’est rapidement imposé comme le vice-capitaine de l’équipe. De son côté, Kevin Volland s’appuyait déjà sur une solide expérience en Bundesliga et avait déjà fréquenté la sélection allemande par le passé. Ses statistiques et l’influence qu’il a eues sur le jeu valident le bon travail de nos recruteurs et de Paul Mitchell. Nous sommes évidemment très heureux qu’il soit sélectionné à l’Euro, d’autant qu’il n’avait plus été appelé depuis 2016. 

L’équipe s’est distinguée par sa jeunesse. C’était, là-aussi, un risque… 

Je reprends l’exemple de notre milieu. L’an dernier, nous avions Tiémoué Bakayoko et Adrien Silva, des joueurs plus expérimentés. Quand j’ai commencé à prospecter pour les remplacer, il y a deux ans, je me demandais si Youssouf Fofana et Aurélien Tchouaméni seraient au niveau. Nous avons parlé avec le Président, avant de sauter le pas. On peut estimer aujourd’hui qu’il s’agit d’une grande réussite puisqu’ils ont renforcé notre milieu de terrain et performé tout au long de la saison. Le risque a payé. 

La fierté est-elle plus grande d’avoir aligné six joueurs issus de l’Academy cette saison ? 

Bien sûr ! Je suis très fier de voir des jeunes s’intégrer comme Chrislain (Matsima), Eliot (Matazo) et les autres. Avec Benoît (Badiashile), ils ont un grand avenir. Et je suis très content que Niko n’hésite pas à les lancer. Il leur donne du temps de jeu et ne les cantonne pas sur le banc de touche. Cela correspond à notre philosophie vis-à-vis de l’Academy qui fait partie intégrante de l’ADN de l’AS Monaco. 

Quel sera l’objectif l’an prochain ? 

Assurer notre présence sur le podium. A quelle place ? On verra. Les pronostics sont difficiles en football. Ce qui est certain, c’est que le président Dmitry Rybolovlev nourrit de grandes ambitions pour le club. Nous allons donc nous battre pour arriver encore une fois le plus haut possible. 

Et en Ligue des Champions ? 

Nous disputerons au mois d’août le troisième tour préliminaire, puis éventuellement les barrages. Nous verrons ensuite. Mais il est évident que nous avons l’ambition, sur le moyen et le long terme, de participer régulièrement à la Ligue des Champions et d’y être performant.

Propos recueillis par Jérémie BERNIGOLE-STROH

Publié le 30 Mai. 09:48