Pour sa deuxième saison sous le maillot à la diagonale, Ismail Jakobs espère poursuivre sa progression et franchir les deux tours préliminaires pour intégrer la phase de groupes de la C1.
Un style vestimentaire qui ferait passer le fashionista Lewis Hamilton pour un ringard. Des tatouages impressionnants qui ornent ses bras et son torse. Une gentillesse et une timidité presque enfantines qui rendent le personnage attachant. Quand il ne couvre pas le côté gauche de l’AS Monaco, Ismail Jakobs se fait discret. L’Allemand de 22 ans, aux origines sénégalaises par son père, range ses habits de footballeur et ne jure que par sa famille et ses amis. Les piliers de sa vie. Il n’empêche que ce fan de mode, joueur le plus rapide du club selon le département Performance, a un objectif. Un rêve, même. Et pas des moindres : disputer la Ligue des Champions. Il nous l’a répété pendant 25 minutes d’entretien dans l’amphithéâtre du Centre de performance.
Comment se sont passées les vacances ?
C’était très bien, merci. J’ai fait beaucoup de choses comme voyager, profiter de ma famille et de mes amis. Les vacances étaient un peu courtes, mais j’ai quand même pu en profiter.
Combien de jours avez-vous eu après la dernière journée de championnat ?
(Il compte) Trois semaines et demi, je crois. Je suis parti à Barcelone et à Ibiza avant de rentrer à Monaco pour assister au Grand Prix de Monaco de Formule 1. Dans la foulée, je suis parti à Miami et à Cancùn.
Beau programme !
Oui, c’est vrai. Mais pour visiter tous ces endroits, j’ai eu droit à cinq jours dans les avions ! (Il rit) J’ai quand même trouvé le temps de passer six jours en Allemagne auprès des miens, à Cologne.
Comment jugez-vous votre première année à l’AS Monaco ?
Nous avons tous connu des débuts difficiles. Nous avons dû digérer rapidement l’élimination en Ligue des Champions car de nombreux matches nous attendaient. On a joué quasiment tous les trois jours. Le rythme était assez dur à tenir. Nous avons très bien terminé en validant une qualification européenne. A titre personnel, mes premiers pas furent discrets. J’ai rejoint l’AS Monaco avec beaucoup d’ambition. Même si je n’ai pas toujours été dans le onze de départ, j’ai disputé de nombreuses rencontres, quasiment 40 sur la saison. Je suis satisfait de mon premier exercice avec le club.
Cette saison débute comme la précédente, à savoir par les tours préliminaires de Ligue des Champions…
C’est la raison pour laquelle nous avons repris plus tôt que nos adversaires. Les sept premières semaines seront essentielles : on va disputer minimum 14 matches ! C’est du jamais vu. Nous devons bien préparer ces rendez-vous, être en très bonne forme d’entrée. Et vu la manière dont on s’entraîne depuis notre retour au Centre de performance, je n’ai aucun doute là-dessus.
Comment sentez-vous l’équipe depuis le retour des vacances ?
Nous avons beaucoup travaillé au bout de dix jours de pré-saison, mais la mentalité et l’énergie dans nos rangs sont très positives. L’état d’esprit a toujours été bon dans l’équipe. Je le sens encore meilleur aujourd’hui.
Qu’est-ce qui vous fait dire ça ?
C’est un ressenti. Personnellement, je me sens mieux parce que je connais tout le monde : les joueurs, le staff… J’ai l’impression d’être à la maison, je me sens en confiance. L’an dernier, à la même période, je débarquais de Cologne. J’étais un peu anxieux d’arriver dans un nouvel environnement, de devoir découvrir une manière de faire différente. C’est beaucoup plus facile aujourd’hui. Même après de rudes séances, je me sens bien. J’aime être ici.
La transition de Cologne, où vous êtes né et avez grandi, vers Monaco fut-elle compliquée à digérer ?
Je me sentais prêt mais partir n’était pas une décision facile à prendre. Les quatre premiers mois étaient assez délicats. Lorsque j’avais un ou deux jours de repos, il m’arrivait de sauter dans un avion pour rejoindre ma famille et mes amis en Allemagne. Ils me manquaient beaucoup. Avant de rejoindre la Principauté, je passais toutes mes journées avec eux. Je n’étais jamais seul. Avec le temps, j’ai fini par trouver un équilibre dans ma vie à Monaco, à l’intérieur du vestiaire comme en dehors.
De quoi avez-vous besoin pour être bon sur le terrain ?
Je connais des joueurs qui ont besoin d’être concentrés à chaque instant sur leur carrière, sur leurs performances. Dans leur tête, c’est football matin, midi et soir. Moi, je dois sortir de cette bulle pour être bien dans ma vie. Lorsque je quitte le Centre de performance, j’en ai fini avec le football pour la journée. Quand je suis avec mes proches, je n’en parle pas. On a d’autres sujets de conversation. A Cologne, lorsque je rentrais d’un match, ma mère savait que je n’avais pas envie d’en discuter et ne me posait aucune question à ce propos. Je suis comme ça.
Un de vos cousins, Nathanael Lukoki, est boxeur professionnel…
(Il coupe) Oui, c’est un champion. Un vrai. Je suis toujours impressionné par la quantité de travail qu’il abat pour être au top. J’aime le regarder sur un ring. D’ailleurs, il a un combat important dans les prochains jours. J’ai hâte.
Vous comparez vos activités ?
Bien sûr. On parle beaucoup via FaceTime, tous les jours. Il s’entraîne quotidiennement, sans répit, mais ne gagne pas beaucoup d’argent, ce qui interpelle car il exerce aussi à un niveau professionnel. Un boxeur donne et reçoit des coups, peut se blesser gravement… Je suis vraiment fier de lui. Il est ambitieux, motivé. Il s’entraîne tout seul, porte une attention extrême à son poids… C’est fou. J’espère qu’il remportera le championnat du monde un jour.
Quelles sont vos autres passions ?
J’aime beaucoup regarder la Formule 1 et jouer au tennis et au golf. Je n’ai pas trop l’occasion de m’adonner à ces passions durant la saison parce que je suis fatigué après un entraînement. Donc je rentre à la maison, je passe mes journées avec mes amis, on mange souvent dehors…
Et la mode ?
(Il sourit) J’adore ! J’aime être bien habillé. C’est une passion.
Quels conseils donneriez-vous pour être aussi stylé que vous ?
(Il éclate de rire) Chacun son style ! Je ne pense pas que le mien soit au goût de tous. J’aime porter des jeans larges. Le style américain, quoi. Ce n’est pas pour tout le monde, notamment à Monaco. (Il rit) Les habitants ne sont pas forcément habitués à ce type de vêtements. Mais je suis à l’aise avec ces affaires. Je ne changerai pas !
Vous partagez le vestiaire avec deux joueurs allemands, Kevin Volland et Alexander Nübel. Vous restez souvent ensemble ?
Avoir des joueurs qui parlent la même langue que vous dans un vestiaire offre toujours une expérience différente. Je passe beaucoup de temps avec eux et avec d’autres sportifs allemands qui résident à Monaco, comme le tennisman Alexander Zverev ou le pilote Nico Hulkenberg. Nous essayons de dîner ensemble régulièrement.
Myron Boadu, dans notre précédent numéro, nous a beaucoup parlé de vous. Comment s’est nouée votre amitié ?
Nous avons rejoint le club au même moment. Des liens se sont immédiatement créés. On partage plusieurs points communs : nous avons quasiment le même âge, notre carrière ne fait que débuter, nous avons quitté nos familles pour la première fois. On aime bien passer du temps ensemble après l’entraînement. Avec Kevin et Alexander, Myron est l’un des joueurs dont je suis le plus proche dans l’équipe.
D’après les données collectées par le département Performance du club, vous êtes le joueur le plus rapide de l’équipe. Votre capacité à répéter les efforts est également louée. Comment avez-vous façonné cet aspect de votre jeu ?
Ce n’est pas vraiment quelque chose que j’ai travaillé. A l’adolescence, je n’étais pas rapide. Cette qualité est arrivée avec le temps. J’ai remarqué un changement à mes 17, 18 ans. On pouvait l’expliquer par ma taille modeste (1,81 m, tout de même !) et mon physique assez maigre.
Vous détenez également la nationalité sénégalaise de par votre père. Quels liens entretenez-vous avec ce pays ? Pourriez-vous jouer pour les Lions de la Teranga ?
Le Sénégal est ma deuxième maison. Mon père y est né. J’ai toujours de la famille là-bas. Bien sûr, je serais fier de porter les couleurs de ce pays. Mais je ne ferme aucune porte. Si je dispute de nombreux matches et que je fais une bonne saison avec Monaco, j’aurai probablement le choix entre l’Allemagne et le Sénégal. Je n’ai pas encore décidé. Je fais mon travail sur le terrain et je verrai ce qui arrivera. Et si rien ne vient, je n’aurai pas matière à réfléchir. (Il rit)
Si vous n’aviez pas fait carrière, quel métier auriez-vous exercé ?
J’ai commencé le football à 4 ans. Je jouais tout le temps. Je ne pensais qu’à devenir footballeur professionnel. C’était mon rêve. J’étais en échec scolaire. Je me posais la question de mon avenir. Mes parents m’ont dit : « Tu as deux ans pour te dédier pleinement à ta carrière. Si tu n’y arrives pas, tu retournes en classe. » C’est durant cette période que j’ai intégré l’équipe première de Cologne. Heureusement, parce que je n’avais aucun plan B ! (Il rit)
A l’aube de cette nouvelle saison, que pouvons-nous vous souhaiter ?
Tout le monde veut rejoindre la phase de groupes de la Ligue des Champions. C’est un immense rêve dans ma carrière. Derrière, faire une bonne saison sous le signe de la constance, se qualifier une nouvelle fois pour la C1. De mon côté, j’ai envie de jouer le plus de rencontres possibles. Les opportunités seront encore nombreuses cette saison. Et être heureux.