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Roland Biancheri dans son bureau du Stade Louis-II.Roland Biancheri dans son bureau du Stade Louis-II

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INTERVIEW – Roland Biancheri : « Il faut maintenir la famille de l’AS Monaco dans l’unité »

Successeur de Louis Biancheri à la tête de l’Association Sportive de Monaco (ASM) depuis cet été, Roland Biancheri nous a présenté une feuille de route très claire centrée sur l’unité.

En ce vendredi 19 septembre, Roland Biancheri reçoit dans son modeste bureau du stade Louis-II. Polo rouge de l’ASM Omnisports sur les épaules, le nouveau président de l’institution est déjà à pied d’œuvre. « La rentrée est toujours un temps fort de l’année, explique-t-il en pianotant sur le clavier de son ordinateur. L’effet des Jeux olympiques se fait déjà ressentir. » Celui qui s’appuie sur une expérience de 50 ans au sein du club garde aussi à l’esprit les autres dossiers urgents qu’il aura à gérer dans les prochains mois, dont la suite des célébrations du centenaire. Avant de raconter son histoire avec l’ASM et de témoigner son attachement aux valeurs de partage et d’unité, Roland Biancheri a d’abord souhaité rendre un hommage appuyé à son emblématique prédécesseur, Louis Biancheri (aucun lien de parenté), « un monument ».

Vous avez pris la présidence de l’ASM Omnisports cet été. Que représente ce poste à vos yeux ?

Ce rôle revêt une importance capitale, d’autant plus que je succède à une figure emblématique, Louis Biancheri, qui a occupé la présidence pendant 45 ans. Avec mon équipe, nous nous attacherons à poursuivre le travail de nos prédécesseurs, afin de garantir la pérennité de l’association, tout en lui insufflant un nouvel élan pour l’adapter aux exigences de notre époque. Notre ambition est de fédérer autant que possible, de favoriser les échanges et de permettre à chacun de pratiquer la discipline de son choix. En ce sens, le parcours accompli par l’ASM est déjà fantastique. Nous le devons à la politique sportive instaurée par le Prince Rainier III et le Souverain actuel.

Louis Biancheri a dirigé l’ASM pendant 45 ans. Quel héritage laisse-t-il au club ?

Louis est un monument. Il a profondément marqué l’histoire de l’ASM en parvenant à préserver son unité et son esprit de famille, malgré un contexte de plus en plus individualiste. Sous sa présidence, les sections sportives ont considérablement évolué, certaines passant d’un niveau local à des ambitions nationales, comme l’ASM Volley, tandis que le rugby connaît une expansion rapide. Toutefois, la gestion des infrastructures sportives reste un défi majeur sur le territoire restreint de Monaco. Dans la continuité de son travail, plusieurs projets nous attendent, notamment le regroupement des activités sportives pour éviter les doublons au sein de la Principauté, et la révision des règlements et statuts de l’ASM en prévision de la future loi sur le sport. Ces adaptations seront cruciales pour l’avenir de l’association.

Quelle est votre histoire avec l’ASM ?

Cette question ne me rajeunit pas, car cela fait maintenant 50 ans que je suis engagé auprès de l’ASM. (Rires.) J’ai débuté en pratiquant le basket-ball avec sérieux, mais sans prétentions particulières. Au fil des années, le bureau de l’époque, constitué notamment de MM. Pollano et Tripodi, a souhaité que je m’implique davantage dans les aspects administratifs du club. J’ai ainsi occupé le poste de secrétaire avant de devenir vice-président. J’ai accédé à la présidence en 1994, à un moment où le club, alors doté d’une équipe de haut niveau, traversait de graves difficultés financières et repartait en Excellence Régionale. Il nous a fallu une douzaine d’années pour redresser la situation. On parle d’une section qui a, depuis, atteint des niveaux vertigineux. Par la suite, j’ai intégré l’ASM en tant que vice-président, il y a une vingtaine d’années, en succédant à Pierre Bessone, ancien joueur de la Roca Team et membre actif de cette institution.

Quelles sont les valeurs du club qui ont contribué à sa pérennité ?

Notre engagement principal a toujours été de transmettre les valeurs du sport et de créer les meilleures conditions pour que les enfants et adolescents puissent s’épanouir. Sur le terrain, le tatami ou dans la salle de sport, chacun porte la même tenue, éliminant ainsi les différences et tout sentiment de stigmatisation. Nous inculquons également le comportement adéquat, dans un environnement monégasque caractérisé par une diversité culturelle exceptionnelle. Nos entraîneurs, éducateurs et accompagnateurs apprennent souvent des langues étrangères pour s’adapter au mieux à chaque athlète. Notre mission est d’accueillir tout le monde et de garantir le bon déroulement de chaque activité, en collaboration avec la Direction de l’Éducation Nationale, de la Jeunesse et des Sports, afin d’assurer une continuité dans l’encadrement des jeunes. Nous nous assurons aussi que chaque section dispose d’éducateurs qualifiés. Enfin, nous bénéficions d’un grand nombre de bénévoles engagés, une ressource précieuse mais de plus en plus rare. Il est crucial de les préserver et de valoriser leur engagement, d’autant plus que la recherche de nouveaux encadrants devient de plus en plus complexe. Nous devons donc redoubler d’efforts pour attirer des personnes prêtes à s’investir dans notre association.

Comment est née l’idée d’inviter Bigflo et Oli pour ce concert unique sur le Port ?

Leur venue, au lendemain de la fête de la musique, a été organisée en étroite collaboration avec les différentes autorités telles que la mairie et le gouvernement, et avec le soutien indéfectible du Prince Albert II. Elle a été le fruit d’un concours de circonstances et a nécessité des mois de négociations. Nous souhaitions faire appel à un artiste déjà en tournée – pour des raisons logistiques – et capable de toucher un large public. Nous avons travaillé de manière réfléchie et avons transmis notre projet à Bigflo et Oli, soutenus par un dossier solide. Ce fut un succès. Le duo, originaire de Toulouse, ne s’attendait certainement pas à voir des Monégasques chanter leurs morceaux avec autant d’enthousiasme ! Cela les a visiblement galvanisés. En voyant le public trempé par l’averse, ils ont versé de l’eau sur eux-mêmes pour se joindre à l’ambiance et partager ce moment. Oli a même pris le temps de saluer les spectateurs placés derrière la zone technique. Le succès de l’événement a été tel que beaucoup souhaiteraient le renouveler l’année prochaine, bien que cela semble difficile à envisager. (Rires.)

Si vous deviez imaginer l’ASM dans 100 ans, à quoi ressemblerait-elle ?

(Sourire.) Je ne pense pas qu’il faille envisager des transformations radicales. Je crois que plusieurs disciplines continueront de faire partie de notre offre sportive, tandis que d’autres viendront s’y ajouter. Le e-sport devrait gagner en importance, à l’image de ce qui se passe dans d’autres pays avec des évènements rassemblant des milliers de spectateurs. J’espère toutefois que nous préserverons l’essence même de l’activité sportive, et que l’épanouissement de l’être humain restera au cœur de nos préoccupations. Peut-être assisterons-nous à l’émergence d’une gamme de pratiques plus diversifiée, grâce aux avancées de la science et aux progrès de l’humanité. Il est envisageable que les sportifs amateurs, au lieu de mettre un terme à leur carrière à 35 ou 38 ans, puissent prolonger leur pratique. Quant aux jeunes, ils bénéficieront sans doute d’un accompagnement encore plus adapté à leurs besoins. La gestion de l’espace et des infrastructures restera aussi un enjeu majeur. Si nous parvenons à maintenir cette grande famille unie, ce sera un accomplissement considérable. Jusqu’à présent, nous avons respecté la volonté du Prince Rainier III de rassembler ces trois lettres, ASM, sous une seule et même bannière. Il nous faudra évoluer avec notre temps tout en préservant cet héritage.

Propos recueillis par Jérémie Bernigole

Publié le 13 Oct. 08:53