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Education – Jean-Philippe Vinci (ENJS) : « Je mets l’accent sur la santé des élèves »

Jean-Philippe Vinci, le nouveau directeur de l’Education nationale, de la Jeunesse et des Sports, fait le point sur ses dossiers en cours.

Enseignant au Lycée Albert-Ier depuis 1996, Jean-Philippe Vinci a été nommé directeur de l’Education nationale, de la Jeunesse et des Sports le 1er juillet dernier. Il succède ainsi à Isabelle Bonnal qui a fait valoir ses droits à la retraite. Cet agrégé de philosophie, titulaire d’un master de Sciences Po Paris où il a exercé comme maître de conférences, connaissait déjà ce service important pour y avoir occupé le poste de chargé de mission pendant trois ans. Jean-Philippe Vinci nous a reçu le 13 janvier dans son bureau, en compagnie de Stéphan Maggi, coordonateur des projets périscolaires, pour faire un premier état des lieux. Au cours de cet entretien, il a abordé ses dossiers du moment et souligné à maintes reprises l’importance du sport chez les plus jeunes. Sans manquer de nous faire part de son amour pour le Japon.

Vous avez pris vos fonctions de directeur de l’Education nationale, de la Jeunesse et des Sports en juillet dernier. Comment avez-vous accueilli cette nomination ?

Je l’ai reçue comme une véritable marque de confiance de la part du Prince Souverain et du Gouvernement princier. En même temps, j’étais pleinement conscient que c’était une responsabilité importante. Mon objectif est donc de faire de mon mieux pour répondre aux attentes et relever ce grand défi.

Comment s’est passée votre intégration dans ce service que vous connaissiez déjà ?

Comme vous le soulignez, j’y ai travaillé durant trois ans comme chargé de mission aux côtés de S.E. Yvette Lambin-Berti. Cette expérience a été un atout précieux, car elle m’a permis de bien comprendre les rouages de l’Administration et d’anticiper la difficulté de la tâche. L’intégration s’est donc bien déroulée. Il me restait à établir des liens avec l’équipe, faire un état des lieux et préparer la rentrée.

Avez-vous eu le temps d’analyser l’état de l’Education nationale, de la Jeunesse et des Sports ?

L’ouverture du nouveau collège Charles-III a été une priorité absolue et l’avancée des travaux a nécessité toute notre attention durant l’été. Concernant la rentrée, elle avait été bien préparée par mon prédécesseur. Par la suite, nous avons entrepris un état des lieux en rencontrant les chefs d’établissement et en réalisant un audit pour bien comprendre la situation sur le terrain.

Quels sont vos chantiers prioritaires ?

Mes priorités sont d’abord liées à des réformes institutionnelles en cours, notamment dans le cadre de la transformation de l’éducation en France, ainsi qu’aux mouvements de personnel. Parmi mes priorités personnelles, je mets l’accent sur la santé des élèves, tant physique que psychique, en lien avec des sujets comme le numérique, le harcèlement et le bien-être à l’école. Le numérique est une priorité centrale, nécessitant une collaboration étroite entre les familles, les enseignants et les associations afin de trouver des solutions adaptées. Enfin, je me rends actuellement au sein des écoles primaires pour rencontrer les enseignants et évaluer les besoins spécifiques de ce secteur fondamental.

Vos premiers pas ont été marqués par de nombreux dossiers à gérer. Quel bilan faites-vous de vos six premiers mois ?

Six mois, c’est trop court pour dresser un bilan complet, mais nous avons déjà identifié des actions à mener. Par exemple, le Gouvernement princier a décidé de réactiver la Commission Consultative des Jeunes, car il est essentiel de repenser la politique de la jeunesse. Pour le sport, sous l’impulsion du Département de l’Intérieur, nous anticipons des échéances importantes, notamment la réunion des Ministres des Sports du Conseil de l’Europe en 2026. Ces dossiers se précisent, mais le bilan global, lui, se fera dans quelques années.

A Monaco, le sport fait partie intégrante de l’éducation. Quelle importance comptez-vous lui accorder au sein des établissements scolaires ?

En Principauté, le sport est très important à tous les niveaux. Dès le primaire, nous avons des professeurs d’EPS diplômés – une politique instaurée depuis plus de trente ans -, ce qui permet un développement physique optimal des enfants. La lutte contre l’obésité, par exemple, commence dès la maternelle. A Monaco, nous envisageons le sport selon deux paradigmes : la performance et la compétence. Depuis deux décennies, l’EPS s’intéresse surtout au second dogme, c’est-à-dire à la maîtrise du corps, du geste et de soi. A titre personnel, je pense que le sport, d’un point de vue éducatif, est essentiel pour le développement de l’enfant. En faisant du sport, il apprend ainsi à maîtriser ce que les psychologues appellent le compulsionnel : canaliser sa violence, savoir s’arrêter, comprendre les règles et les intérioriser…

Dans le podcast de Monaco Info, vous avez déploré le « volume horaire insuffisant » à l’école. Quels sont vos projets en la matière ?

En France, un projet a été lancé pour augmenter les heures de sport, mais il n’a pas abouti faute de moyens. A Monaco, bien que nous soyons dans une situation plus favorable, la question reste complexe. Le volume horaire de sport est en partie déterminé par les textes, mais surtout par la disponibilité des installations sportives. Notre défi majeur est de coordonner les horaires entre les scolaires, les associations et les professionnels, tout en étant limités par le nombre d’équipements disponibles. C’est un vrai casse-tête. Certaines disciplines comme la voile, par exemple, posent des problèmes logistiques : le temps de préparation, la mise à l’eau et le retour au sein des établissements pour suivre d’autres cours scolaires, tout cela rend le volume de deux heures assez court. Mais il y a une réelle volonté d’améliorer cette situation, avec des installations sportives modernes dans les établissements scolaires, telles que des gymnases et des piscines, ce qui est assez unique. Le nouveau collège Charles-III fait cohabiter une grande piscine couverte de 25m et un gymnase multisports. C’est un exploit architectural. L’objectif est de permettre aux élèves de pratiquer le sport entre les cours, sans avoir à se déplacer trop loin. En parallèle, les élèves qui souhaitent s’investir davantage dans le sport peuvent profiter des dispositifs comme l’UNSS et les associations sportives, qui offrent de nombreuses opportunités en dehors du temps scolaire. Si le volume horaire scolaire est contraint, il existe de nombreuses alternatives pour ceux qui veulent vraiment pratiquer.

Monaco compte quelques sportifs en devenir. Comment les mettre dans des dispositions leur permettant de concilier sport de haut niveau et études ?

Nous distinguons deux niveaux différents. Le dispositif « Sport Elite » permet à 73 lycéens d’avoir des horaires aménagés en tenant compte des spécialités dispensées. Ils peuvent ainsi faire du sport à très haut niveau avec plus de 20 heures d’entraînement par semaine. Au collège, ils sont 197 à bénéficier d’un aménagement de leurs horaires au sein du dispositif classes à horaires aménagés pour la pratique du sport intensif. Bien sûr, tout n’est pas possible, il faut être raisonnable. Dans le cadre des classes « Sport Elite », l’enjeu principal est de coordonner les emplois du temps en regroupant des élèves ayant des sports aussi différents que l’aviron, l’équitation ou la natation, tout en gérant leurs impératifs liés aux compétitions et aux déplacements. Pour l’instant, les chefs d’établissement parviennent à organiser cela efficacement. L’un des grands défis, aussi, est de permettre à ces élèves de rattraper les cours qu’ils manquent, ce qui demande un effort considérable de la part des établissements. Je conçois que la méthode ne soit pas aussi idéale que ce que propose la Diagonale, le centre de formation de l’AS Monaco Football. Mais la nôtre répond à un besoin réel pour un grand nombre d’élèves aux profils sportifs variés. Pour les disciplines que j’ai précédemment citées, il est possible d’imaginer des synergies, mais cela comporte aussi des contraintes logistiques et financières. Néanmoins, nous offrons à ces élèves la possibilité de continuer leur pratique à haut niveau tout en passant un Bac général ou technologique avec des spécialités presque choisies sur-mesure. Enfin, il y a les sportifs « ultra-élite ». Là, on parle d’excellence. Il existe des dispositifs dédiés, comme les bourses olympiques, etc. Identifiés par le Comité olympique monégasque, qui les soutient dans leur double projet sportif et académique, ces athlètes bénéficient d’un suivi personnalisé, d’une aide financière…

L’idée, c’est de les inciter à poursuivre leurs études ?

Oui, car c’est très important. Prenons l’exemple du nageur Théo Druenne. Il a fait ses études au lycée Albert-Ier et poursuit actuellement son cursus académique à Laval, au Canada, où il mène de front sa carrière sportive. Il est nécessaire de rappeler à nos sportifs qu’une blessure peut entraver leur progression et leur projet, d’où l’importance d’obtenir le Bac et de ne pas abandonner les études.

Propos recueillis par Jean-Marc Moreno

Publié le 26 Fév. 13:56